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Sept exemples de projets impliquant des consommateurs
Les actions de Alliance sur la Politique Agricole Commune (PAC)
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Des citoyens s'engagent aux côtés des producteurs...

En route vers une nouvelle politique agricole dans l'Union Européenne.
Pour une agriculture durable, offrant des revenus garantissant l’emploi agricole et produisant des produits de qualité accessibles à l’ensemble des consommateurs. Pour la préservation de la biodiversité et des ressources naturelles. Pour un partenariat entre l’agriculture et toutes les composantes de la société.

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Comité de pilotage de la Plate-forme animé par l'Alliance nationale et composé de :
- Association Léo Lagrange pour la Défense des Consommateurs (ALLDC)
- Union Nationale des Associations Familiales (UNAF)
- Conseil National des Associations Familiales Laïques (CNAFAL)
- France Nature Environnement (FNE)
- OGM Dangers
- Confédération Paysanne
- Fédération Nationale d'Agriculture Biologique (FNAB)
- Mouvement Rural de Jeunesse Chrétienne (MRJC)
- Réseau Agriculture Durable

Historique

Depuis janvier 2002, suite à une journée Ac'teur sur la PAC une volonté d'action commune autour de la PAC a vue le jour. Un comité de pilotage s'est mis en place composé de structures de consommateurs, d'environnementalistes et de paysans. A partir d'un texte de revendications de l'association Agrar Bündnis (l'équivalent de l'Alliance allemande), une plate-forme française s'est construite avec de nombreux allers et retours entre les membres du comité.

Le gros travail a été de faire apparaître dans ce texte les revendications des trois familles. C'est après ces mois de travail et d'échanges que le comité de pilotage s'est mis d'accord sur une version définitive de la plate-forme le 15 juillet 2002. Ce texte a été diffusé aux membres de l'Alliance, à ses partenaires ainsi qu'aux députés français et européens, les ministères de l'Ecologie et de l'Agriculture.


Avant-propos

A travers cette Plate-Forme, les associations signataires formulent des propositions pour une profonde réorientation de la politique agricole européenne, afin de soutenir une agriculture diversifiée, respectueuse de la nature et de l’environnement, et offrant des produits de qualité pour l’ensemble des consommateurs. Cette réorientation influencera directement l'élargissement de l'Union Européenne (UE) aux Pays d'Europe Centrale et Orientale (PECO) et les relations Nord-Sud.
Les signataires affirment en préalable que ce modèle d’agriculture n’est pas compatible avec le développement d’une agriculture de type industriel. Sans de nombreux paysans vivant sur des fermes à taille humaine, ces objectifs ne pourront être atteints.
La Plate-forme se concentre sur les aspects des politiques agricoles européennes qui conditionnent, à travers des dispositifs de gestion des marchés et des soutiens publics de diverses natures, la forme du développement agricole, la pérennité des exploitations, la qualité des produits, les modes de production et leurs impacts sur l’environnement et l’aménagement du territoire. Cette proposition vise la refonte de la Politique Agricole Commune (PAC) adoptée à Berlin en 1999 dans le cadre de l’Agenda 2000. Le bilan à mi-étape de la PAC, prévu en 2002/2003 par l’accord de Berlin, doit lancer des signaux très clairs allant dans le sens de ces propositions.

Les signataires sont conscients que le monde agricole est également soumis à d’autres dispositifs et règles, nationaux ou communautaires, dont l’évolution est nécessaire pour réformer pleinement l’agriculture européenne : il s’agit par exemple du droit rural, de la législation vétérinaire, du bien-être des animaux ainsi que du droit environnemental, des politiques nationales d’installation de nouveaux paysans, etc. Ils formuleront ultérieurement des propositions pour de futures évolutions.


Constat
Une politique agricole en crise

L’agriculture traverse actuellement une crise profonde. Le développement des dernières décennies l’a entraîné dans une impasse d’un point de vue écologique, social, éthique et économique.

La politique agricole de l'UE prône toujours, même au regard de la réforme de 1992 et de l’Agenda 2000, l’augmentation de la production et de la productivité, donc la restructuration du secteur agricole. Les excédents qui en résultent doivent être résorbés grâce à des subventions spécifiques à l’exportation : les restitutions et, de plus en plus subtilement, les aides directes afférentes aux produits exportés mais non considérées par l'Accord sur l'agriculture (AsA) de l'OMC comme ayant un effet de dumping. Les prix mondiaux des produits agricoles, en baisse constante, ne sont pas uniquement le résultat de meilleures conditions de production, mais aussi de subventions élevées et de faibles standards sociaux et écologiques de certains pays producteurs (Union Européenne inclus). La surproduction et la structuration des marchés mondiaux aboutissent à une chute constante des prix payés aux producteurs y compris pour les paysans des pays les plus pauvres. Cette situation menace leur existence. Les crises sanitaires se multiplient en même temps que l’intensification des productions, entraînant par " mesure de précaution " des destructions massives d’animaux. Une nouvelle construction d'une éthique du vivant est à mettre en oeuvre.

Au sein de l'UE, on constate une intensification, une concentration géographique et une spécialisation croissante des " exploitations agricoles ", qui en augmentant leurs achats d’intrants accroissent leur dépendance vis à vis des industries de l’agro-chimie.

Le métier d’agriculteur se limite de plus en plus à la production de matières premières à bas prix à destination de l’industrie agricole et agroalimentaire. D’autres services, tels que la protection, la création de paysages, le maintien de la biodiversité, ne sont pas valorisés. Les systèmes de production plus naturels ou nécessitant davantage de main-d’œuvre se trouvent de plus en plus marginalisés du fait, entre autre, de leurs coûts répercutés au seul consommateur. Les effets catastrophiques de notre dumping, notamment celui camouflé sous des aides directes légales vis-à-vis de l'OMC, sur les pays pauvres ne sont pas pris en compte. Les animaux, qui ne sont plus considérés comme des êtres vivants, mais seulement comme des marchandises ou des machines à produire, subissent des conditions d'élevage, de transports contraires à leur bien être.

En dix ans, près de 1 million d’emplois agricoles ont disparu au sein de l’Union européenne (soit plus de 230 chaque jour !) et la tendance ne paraît pas vouloir s’inverser. La taille des fermes augmentant sans cesse, les installations de nouveaux agriculteurs, dont des jeunes, sont rendues difficiles, voire impossibles.

Les territoires naturellement défavorisés, qui offrent souvent les paysages les plus riches et la biodiversité la plus importante, se vident et perdent quelquefois leur intérêt écologique. Les territoires plus fertiles et " mécanisables " se transforment en steppe agraire sans intérêt écologique et s’érodent rapidement.

Les budgets agricoles des Etats ne tiennent pas compte des services écologiques et sociaux que la société civile attend de l’agriculture. La société, qui accepte de moins en moins de payer pour une agriculture en voie d’industrialisation, risque de condamner globalement toute forme de soutien à l’agriculture, ce qui engendrerait de graves conséquences sociales et environnementales.

Il est urgent d’agir. La politique agricole doit changer profondément pour aller vers la défense du bien commun.

Une réorientation de la politique agricole européenne s’impose donc en vue :
- de l’élargissement de l’UE ;
- de l’application de traités internationaux sur le maintien de la biodiversité, de la lutte contre l’effet de serre ;
- de l’application de l’agenda 21 et du programme d’action du 21° siècle pour un développement durable.

Il importe aujourd’hui de prendre des décisions courageuses, qui tiennent compte des demandes de la société, de la nécessité de protéger l’environnement, et qui offrent des perspectives durables aux agriculteurs et au monde rural en pleine mutation.

Les consommateurs, les associations de protection de l'environnement et les organisations citoyennes attendent et soutiennent aujourd’hui de telles démarches et souhaitent un partenariat constructif avec le monde paysan dans lequel, certains se sont déjà engagés.


 

Synthèse

Les crises sanitaires qui se sont succédées ces dernières années (ESB, fièvre aphteuse, etc.) ont renforcé la prise de conscience des citoyens européens des impasses de la PAC.

Les objectifs assignés lors de sa création sont aujourd’hui dépassés : il ne faut plus viser en permanence l’augmentation de la productivité et la baisse constante des coûts de production, mais répondre aux demandes de la société en matière de qualité des produits agricoles (diversité, goûts, sécurité sanitaire, qualité nutritionnelle, santé), de protection de la nature et de l’environnement, de bien-être animal, et d’emploi agricole. De tels objectifs vont de pair avec un aménagement équilibré du territoire et la préservation d’un monde rural attractif et vivant.

Les revendications des organisations signataires sont les suivantes :

1. Organiser les marchés agricoles pour stopper la course à la production et améliorer la rémunération des paysans

Les organisations dénoncent les politiques de libéralisation des échanges agricoles développées pour répondre aux accords signés dans le cadre de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Aujourd'hui, preuve est faite que le marché ne peut à lui seul permettre l'éradication de la faim, la généralisation d’une agriculture de qualité ou la pérennisation et l’installation d’un nombre important d’agriculteurs. Les petits agriculteurs, au Sud comme au Nord, sont les premières victimes de prix agricoles maintenus artificiellement bas sur les marchés internationaux. C’est pourquoi les organisations signataires revendiquent :

. La reconnaissance et l’inscription dans les accords internationaux du principe de souveraineté alimentaire et du droit à la protection des agricultures pour l’ensemble des pays du monde.

. L’abandon par l’Union européenne de sa stratégie de conquête des marchés internationaux et de dumping économique et social afin de protéger la souveraineté alimentaire des pays, de mettre fin à l'exportation d'excédents préjudiciables aux petits agriculteurs du Sud, de stopper la dérive productiviste de l’agriculture européenne et de favoriser une meilleure rémunération des producteurs par la vente de leurs produits. Elle doit par conséquent abandonner tous soutiens, directs et indirects, favorisant les exportations, et s'engager à défendre au sein de l'OMC et auprès des pays exportateurs (notamment les Etats-Unis et les pays du groupe de Cairns) la suppression généralisée des politiques de dumping à l'exportation, pérenniser et améliorer les instruments de maîtrise quantitative des productions existants (l'application aux quotas laitiers est exemplaire) et en instaurer de nouveaux pour les productions actuellement non maîtrisées (viandes, céréales, fruits et légumes, etc.).

. La reconnaissance pour les Etats et communautés d’Etats du droit d’appliquer des protections tarifaires et des référentiels qualitatifs pour les produits agricoles et alimentaires. Les Etats ou groupe d’Etats doivent pouvoir refuser l’importation de certains produits notamment en raison de modes de production contraires à la réglementation et à l'éthique locale, non respectueux des principes de précaution ou des droits des producteurs et des consommateurs (hormones, OGM, etc.). Une telle prise en compte des normes qualitatives pour les produits et les modes de production est vitale pour les producteurs et les consommateurs et doit donc être intégrée dans les traités de l’OMC.

2. Répartir et améliorer la distribution des soutiens publics, en privilégiant une agriculture "durable" sur les petites et moyennes exploitations

Les aides publiques à l’agriculture doivent soutenir les systèmes de production relevant d’une agriculture durable, la réorientation des productions intensives et privilégier les exploitations de petite et de moyenne dimension économique. De même, toutes les aides directes doivent être plafonnées par actif afin de ne pas encourager l’agrandissement et l’industrialisation des exploitations. Elles doivent aussi être conditionnées au respect de critères écologiques et sociaux, afin d’encourager ceux qui vont au delà des normes légales et qui créent ou maintiennent des emplois dans l’espace rural et dans des fermes à taille humaine.
Dans le cadre du règlement horizontal de la PAC, deux instruments doivent être privilégiés :

a. l’effort de modulation des aides doit être poursuivi selon le principe même d’équité sociale entre les exploitations agricoles européennes. Ainsi toutes les aides directes doivent être plafonnées, et ce de façon dégressive en fonction de la surface et du nombre d’actifs sur les exploitations. L’objectif de la modulation des aides est de freiner l’agrandissement et l’industrialisation des exploitations, pour permettre une meilleure répartition des crédits agricoles en faveur des petites et moyennes exploitations.

b. le principe d’éco-conditionnalité des aides doit être étendu d'une part à toutes les Organisations Communes de Marché (OCM), pour cibler les principaux enjeux environnementaux, et ce sans restriction, et d'autre part à des mesures et des pratiques spécifiques. Le non respect de la réglementation environnementale et sanitaire, et la non conformité avec les exigences environnementales requises par l’éco-conditionnalité, doivent être sanctionnés dans chaque Etat membre, par le retrait partiel ou total des aides directes, primes et crédits divers, quotas de production.

Enfin, les organisations demandent le remplacement de la prime au maïs ensilage par une prime fourragère unique ainsi que la mise en œuvre d’un programme d’action favorisant l’autonomie en protéine des exploitations européennes sachant que l'UE doit se battre pour imposer rapidement une protection suffisante à l'importation de l'ensemble des aliments du bétail. Ainsi pourra-t-on réparer le préjudice porté aux cultivateurs d’herbe et de légumineuses, et stopper le processus d’intensification et d’industrialisation des productions.

3. Améliorer le volet développement rural de la Politique Agricole Commune

Les organisations signataires ne sont pas favorables à la déconnexion nette des deux piliers de la PAC et au renforcement du second pilier au détriment du premier : c'est une approche intégrée et multifonctionnelle de l'agriculture qu'elles entendent promouvoir. Toutes les productions doivent être astreintes à une forte conditionnalité sociale et environnementale. En attendant, le volet développement rural de la PAC doit être mieux soutenu et clairement réorienté dans le sens d’un développement coordonné des espaces ruraux. Les objectifs et les instruments des politiques de développement rural doivent être réorientés dans le sens d’un véritable soutien à une agriculture durable et multifonctionnelle. La protection de l’emploi agricole doit prendre toute sa place dans les politiques de développement rural, au même titre que les politiques agri-environnementales, celles visant l’amélioration de la qualité des produits et le bien être animal. Les programmes du second pilier doivent être suffisamment adaptables pour intégrer les diversités régionales. Afin de respecter le principe de subsidiarité, il faut continuer à déléguer des compétences et des responsabilités de l’UE aux régions avec les financements pour l’information, la formation, et l’animation rurale. Enfin, pour ne pas défavoriser les Etats les moins riches de l’Union européenne, la participation des Etats au co-financement du second pilier de la PAC doit être différenciée selon le degré de richesse des pays.

4. Organiser une évaluation de la totalité de la Politique Agricole Commune

Aujourd'hui seule la mise en œuvre des politiques de développement rural fait l'objet d'une évaluation régulière. Celle-ci doit être élargie à l'ensemble des subventions publiques afin de mesurer la totalité de leurs impacts sur les ressources naturelles, l'environnement et le monde agricole et rural.


suite : Les revendications des signataires


Alliance Paysans Ecologistes Consommateurs